Une entrevue avec le comédien Gad Elmaleh

Le populaire comédien Gad Elmaleh (à gauche) dirigé par le célèbre cinéaste Costa-Gavras dans le film “Le Capital”, qui vient de prendre l’affiche au Québec.

Ses très nombreux fans ont été pris de court. Personne ne s’attendait à voir un jour le célèbre humoriste et comédien franco-marocain Gad Elmaleh camper dans un film dramatique le personnage d’un Banquier condescendant, véreux et impitoyable.

Le créateur de Chouchou -un travesti homosexuel maghrébin très hilarant- et de Coco -un Sépharade archimillionnaire excentrique et loufoque- nous avait habitués à des rôles comiques, créneau artistique où il excelle.

Gad Elmaleh est la vedette principale du Capital, le dernier film d’un grand Maître du 7ème Art, le réalisateur franco-grec Costa-Gavras.

Le Capital vient de prendre l’affiche au Québec.

Ce thriller financier au suspense haletant nous plonge dans les dédales de la Haute Finance internationale et met au jour le côté très hideux de cet uni­vers glauque régi par la Loi décapante du profit et de la spéculation boursière les plus débridés.

Le film narre l’irrésistible ascension d’un valet de Banque dans le monde féroce de la Haute Finance. 

Au cours d’une entrevue, qu’il nous a accordée depuis son domicile parisien, Gad Elmaleh nous a relaté la genèse de ce Projet cinématographique concocté par Costa-Gavras.

“Quand on m’a appelé pour me dire que Costa-Gavras voulait me rencontrer, j’étais content, flatté et très curieux de savoir ce qu’il allait me proposer. Costa-Gavras est l’un des plus grands cinéastes contemporains. Je me souvenais de Z, son film mythique, dont le rôle principal a été interprété magistralement par Yves Montand. J’étais convaincu qu’il ne me proposerait pas de jouer dans une comédie”, raconte-t-il.

Le plus grand humoriste de France et de la Francophonie avait déjà interprété un “rôle dramatique” dans La Rafle, un film très poignant de Rose Bosch relatant l’arrestation, le 16 juillet 1942 à Paris, par la police fran­çaise de 13000 Juifs et leur réclusion dans le Vélodrome d’Hiver de sinistre mémoire avant leur déportation vers le Camp d’extermination nazi d’Auschwitz-Birkenau.

“La Rafle, c’est un film important dans ma carrière, mais je ne joue pas le premier rôle. Dans Le Capital, je tiens le rôle principal”, précise Gad Elmaleh.

Quand le comédien demanda à Costa-Gavras pourquoi il l’avait choisi pour jouer le premier rôle dans son nouveau film, ce dernier lui répondit candidement: “Parce que quand vous ne souriez pas, vous avez l’air très sérieux, voire mélancolique parfois. Je veux vous proposer le rôle d’un mec qui n’a pas de qualités humaines, un Banquier sans scrupules qui est une bête, une machine à broyer des âmes humaines.”

Avant d’accepter d’embarquer dans cette ambitieuse aventure cinématographique, Gad Elmaleh a lu très attentivement le scénario du “Capital”, qu’il a trouvé “très intéressant”.

“J’ai quand même averti Costa-Gavras que je ne savais pas si j’allais pouvoir être à la hauteur du rôle qu’il venait de me confier. Mes réticences étaient sincères, ce n’était pas de la fausse humi­li­té. Costa-Gavras m’a alors rassuré en me disant:  “Comptez sur moi, je sais ce que je vais prendre de vous”. Il m’a donné le DVD d’un de ses grands films, Missing, où Jack Lemmon, grand acteur dans plusieurs films comiques, dont Certains l’aiment chaud, joue un mec bouleversant. Je ne suis pas de ces acteurs comiques qui rêvent de changer de registre, de faire leur Tchao Pantin -film dramatique remarquable, dont le rôle principal a été brillamment interprété par le regretté humoriste Coluche. Je n’avais pas envie d’un virage. Mais je suis persuadé qu’un acteur doit être capable d’aller d’un registre à l’autre, de jouer différentes choses.”

Qu’est-ce qui est le plus difficile pour Gad Elmaleh: présenter sur scène un one man show comique ou interpréter un rôle dramatique au Cinéma?

“Plus on devient mature, moins on tourne autour du pot! C’est plus difficile pour moi de faire rire. Concevoir et mettre en scène un spectacle comique, c’est un labeur ardu et très exigeant. Tu te retrouves tout seul devant ton public. Celui-ci rit ou ne rit pas! Je ne sais pas si j’ai bien fait le travail que j’avais à faire avec Costa-Gavras, mais je me suis donné à fond.”

Pour se préparer à son rôle de Ban­quier implacable, Gad Elmaleh a lu des livres sur l’univers de la Banque et de la Finance internationale, rencontré de vrais Banquiers, passé plusieurs journées dans des Institutions financières…

“Pour un acteur, travailler avec un cinéaste de la trempe de Costa-Gavras, c’est un immense privilège. Je n’avais qu’à me laisser diriger et piloter par ce grand metteur en scène”, dit-il.

Les “Conseils de Direction” que lui a prodigués Costa-Gavras durant le tournage du Capital lui ont rappelé les “Méthodes de Direction” utilisées par un autre grand cinéaste contemporain, Steven Spielberg, qui, en 2011, a dirigé Gad Elmaleh dans le film Les Aventures de Tintin. 

“Costa-Gavras et Steven Spielberg ont un point commun, que l’on retrouve chez les metteurs en scène les plus ingénieux: quand ils te donnent des indications, ils n’ont pas besoin de te les expli­quer, ni de montrer leur autorité. Ces derniers sont sûrs de leur coup. Ils maîtrisent à la perfection toutes les phases de leur travail de mise en scène.”

Comment les fans de Gad Elmaleh ont-il accueilli sa prestation dans le rôle à contre-emploi que lui a offert Costa-Gavras?

“Ils ont été plus que surpris, même déstabilisés, dit-il. Le Capital n’a pas été un grand succès populaire. Mais ce film a quand même fait son chemin. Il a été présenté et primé dans plusieurs Festivals de Cinéma internationaux. J’ai l’impression que mon public n’avait pas envie de me voir dans le rôle d’un Banquier cruel. C’est un changement de rôle et de registre qui est délicat dans la carrière d’un artiste. Mon public, qui a très bien accueilli mes films comiques, Coco -écrit et réalisé par Gad Elmaleh-, Un Bonheur n’arrive jamais seul -film où il a partagé la vedette avec la populaire comédienne Sophie Marceau… n’a pas été au rendez-vous cette fois-ci.”

Gad Elmaleh a-t-il de futurs Projets au Cinéma?

“Pas du tout. En ce moment, je me suis mis en stand by pour ce qui est du Cinéma. J’ai dit à mon agent que je voulais vraiment me consacrer entièrement à la scène. Je suis tellement heureux sur scène. Et puis, j’essaye de passer le plus de temps possible à Paris. Je viens d’être papa d’un petit garçon. J’ai envie de passer beaucoup de temps avec lui. Pour cela, j’ai  même choisi, pour présenter mon spectacle, des Théâtres situés près de la maison.”

Gad Elmaleh, dont le nouveau spectacle, Sans Tambour, qu’il a présenté à Montréal l’automne dernier, fait actuellement un tabac à Paris et dans toute la France, vient d’être invité pour la première fois à Abou Dabi, dans les Émirats Arabes Unis. Il a présenté son nouveau spectacle à deux reprises, à guichets fermés, devant 2500 spectacteurs francophones chaque soir.

 

In an interview from his  home in Paris, Franco-Moroccan comic Gad Elmaleh talks about the dramatic role he plays in Le Capital, now in Quebec theatres, which he was offered by filmmaker Costa-Gavras.